En automne dernier, nous avons assouvi notre envie de grand air en passant un week-end dans le Larzac. Cette terre mythique, emblème des chevaliers et des brebis nous en a mis plein les yeux. Nous avons découvert les 5 cités Templières et Hospitalières, visité une cave de Roquefort, dégusté de bons repas, dépensé quelques calories sur le vélorail du Larzac et randonné au cœur d’une forêt aux allures d’Harry Potter. Tout ça en deux jours sans se presser grâce à la proximité des lieux. 1000 vies sont à vivre dans le Larzac !
Le plateau du Larzac : des brebis et des hommes
Le causse du Larzac s’étend sur plus de 1000Km entre Millau (Aveyron) et Lodève (Hérault). C’est un haut plateau karstique du sud du Massif central dont l’altitude varie entre 600 et 1060 mètres environ. Territoire sauvage aux paysages si typiques, avec sa végétation basse, ses rochers aux reliefs abrupts, ses vallées encaissées, c’est un lieu idéal pour se mettre au vert et profiter des activités de pleine nature.
Partie intégrante du Parc naturel régional des Causses et Cévennes, il est inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2011. Formé au Jurassique (-200 à – 145 millions d’années) après le retrait d’un océan, c’est aujourd’hui un lieu phare de l’agropastoralisme.
Sur ce territoire rural d’une vingtaine de communes environ 30 000 habitants sont dénombrés dont 22 000 à Millau. Ils travaillent principalement dans le secteur de l’agriculture qui est caractérisé par l’élevage et la production de lait de brebis. En comparaison, l’Aveyron étant en tête des territoires producteurs de lait de brebis, il y’aurait environ 750 000 brebis laitières et « viande » (chiffres de 2016) sur le département dont une partie importante dans le Larzac. Les brebis sont en force !
Le Larzac, tout un symbole
Si le Larzac vous dit déjà quelque-chose, c’est peut-être parce que vous vous souvenez du mouvement de désobéissance civile des années 1970 ?
De 1971 à 1981 un mouvement orchestré par des paysans locaux a pris de l’ampleur et est venu contrer le projet d’extension d’un camp militaire sur le causse. Ce camp qui faisait déjà 3000 hectares avait pour projet de dépasser les 17 000 hectares en s’accaparant de nombreuses terres agricoles. En 1973 des centaines de milliers de personnes sont venues dans le Larzac pour soutenir les paysans et mener une guerre d’usure face aux pouvoirs publics. Le territoire est devenu un symbole de contestation populaire dans le pays réunissant du même côté des féministes, des hippies prônant la paix, des défenseurs de l’amour libre, des nationalistes …La lutte fut victorieuse car le projet fut abandonné en 1981 par François Mitterrand.
Les Templiers & Hospitaliers
Terre de légendes et de chevaliers, le Larzac a été marqué par la présence de l’ordre du Temple et de l’ordre des Hospitaliers.
Tout commence en 1129 à l’occasion du concile de Troyes lorsque l’ordre du Temple est créé. Il s’agit d’un ordre religieux et militaire issu de la chevalerie chrétienne du Moyen-Age. La mission de ces «moines chevaliers» dénommés «Templiers» est d’accompagner et protéger les pèlerins qui partent en direction de Jérusalem dans le contexte dangereux de la guerre Sainte et des croisades au XIIe et XIIIe siècle. L’ordre participe activement aux batailles de la Reconquête Ibérique. Afin de financer ses missions, il se constitue à travers l’Europe catholique un patrimoine important basé sur un réseau de monastère appelés «commanderies ». Ces commanderies bénéficient de dons et de privilèges notamment au niveau fiscal.
Le 11 décembre 1158, Raimond Béranger IV, comte de Barcelone et roi d’Aragon, donne à l’ordre du Temple une vaste étendue de terre sur le plateau calcaire du Larzac. C’est ainsi que les Templiers ont pu y étendre leurs possessions, construire des églises, des forteresses … et laisser leur empreinte. Après la perte définitive de la Terre Sainte, l’Ordre ne connut pas un meilleur avenir en France. Il fût déclaré hérétique et dissous par le Pape français Clément V en 1312.
L’ordre des Hospitaliers (ou les Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem), quant à lui, fut créé en 1113 à Jérusalem. Leur mission principale était de procurer des soins aux malades mais peu à peu ils se sont militarisés comme les Templiers. Au fil de leur histoire mouvementée, les chevaliers hospitaliers sont devenus chevaliers de Rhodes puis de Malte. Même si l’aspect militaire prit le dessus, l’Ordre garda toujours une dimension hospitalière.
Les Hospitaliers reprirent les possessions des Templiers dans le Larzac. Au XVème siècle ils construisirent des remparts afin de se protéger des pilleurs. Ils resteront sur nos terres jusqu’à la Révolution.
5 villages fortifiés à découvrir
Si vous aimez les villages médiévaux et que l’histoire des Ordres a éveillé votre curiosité, n’hésitez pas à réaliser le parcours « Les remparts du Larzac » . Cet itinéraire d’une cinquantaine de kilomètres sur le causse permet de découvrir les 5 sites Templiers & Hospitaliers : Sainte-Eulalie-de-Cernon, La Cavalerie, La Couvertoirade, le fort de Saint-Jean d’Alcas et la Tour du Viala-du-Pas-de-Jaux.
Sainte-Eulalie-de-Cernon
On commence par la capitale des sites templiers hospitaliers où vous découvrirez l’une des commanderies les mieux conservées de France. Je vous conseille de vous perdre dans ses ruelles à l’intérieur et à l’extérieur des remparts, de profiter de la vue et de l’ambiance méditerranéenne de la place de la fontaine…
Pour débuter ce circuit, la meilleure option est de commencer par la visite de la commanderie et de l’église romane Templière. L’ancienne habitation du commandant des Templiers, classée en 1976 est située au cœur du village.
Développant une activité agricole intense afin d’approvisionner leurs frères en Terre Sainte, cette commanderie fût un temps la plus riche du sud de la France. Elle est agréable à visiter et vous permettra d’en apprendre plus sur l’histoire des chevaliers. A l’intérieur il y a également des jeux de société médiévaux en libre accès et une expérience de cinéma immersif. Le film retrace l’histoire du Larzac d’une façon saisissante, je ne peux que vous le conseiller ! (prévoir 30 minutes).
Au-delà de cette visite, d’autres activités sont possibles à Sainte-Eulalie: par exemple le reptilarium du Larzac ou le vélorail. Des activités originales qui plairont à toute la famille !
La Cavalerie
Située à 8Km de Sainte-Eulalie-de-Cernon, La Cavalerie est un autre village Templier/Hospitalier phare de la région. Ses remparts du XVème siècle ont été parfaitement restaurés et en saison il est possible de prendre de la hauteur en parcourant le chemin de ronde. Cette magnifique restauration a d’ailleurs valu à la commune l’obtention en 2009 du premier prix national « des Rubans du Patrimoine » (prix récompensant la réhabilitation du patrimoine) et la « Marianne d’Or » (récompense pour le bon usage de la démocratie locale).
Une fois les remparts franchis via l’une des imposantes portes fortifiées, le village dévoile toute sa richesse : rues en pavés, jolies maisons du XVIIIème siècle, anciens hôtels particuliers, architecture traditionnelle du Causse avec les toits en lauzes…
La commanderie de La Cavalerie (rattachée à celle de Sainte-Eulalie) fût fondée en 1154. Au départ, il y avait deux villages : La Cavalerie Vieille et La Cavalerie Neuve sur le lieu de l’actuelle commune. Les Hospitaliers fortifièrent le bourg en 1435. L’enceinte est pourvue de trois tours rondes et d’une tour carrée appelée donjon carré des Templiers. Dans l’étonnante église du XVIIIème siècle dont l’intérieur ressemble à celui des bergeries voûtées, les vestiges de l’église des Templiers sont conservés.
Le point d’Accueil Touristique est situé dans l’enceinte des remparts au début de la « rue de la ville ». La visite guidée pour les individuels est possible en juillet-août. Le reste de l’année les audioguides sont disponibles pour une visite commentée.
La Tour du-Viala-du-Pas-de-Jaux
Cap sur l’ouest à 16 Km de là pour aller à la rencontre d’un autre site Hospitalier, celle que l’on surnomme « le phare du Larzac ».
Idéalement située au milieu des espaces sauvages et habités, la tour du Viala-du Pas-de-Jaux, haute de 30 mètres est une tour-grenier réalisée en 1430 par les Hospitaliers. C’est la plus grande tour de ce genre en Aveyron, elle servait à abriter la population et les vivres en cas de danger. Avant sa construction, les habitants devaient se rendre à Sainte-Eulalie-de-Cernon. Cet éloignement les a conduit à solliciter l’autorisation d’élever cette imposante tour, à l’origine séparée du logis existant. D’importants travaux de restauration ont été entrepris pour la sauver.
Lors de votre visite, 6 étages vous invitent à voyager dans le temps pour mieux comprendre l’histoire et les secrets du lieu. Vous apprendrez aussi beaucoup de choses sur l’histoire du village, des Hospitaliers, sur la nature du Larzac ou encore sur le roquefort. Vous y découvrirez de nombreux éléments restaurés : cheminées, petites fenêtres à coussiège, grande voûte, chemin de ronde avec mâchicoulis, toiture de lauzes… La projection d’une vidéo est proposée en début de visite.
Au sommet, une superbe vue à 360° vous attend ! Le paysage agropastoral des Causses et Cévennes s’offre à vous. Attention c’est une expérience décoiffante au sens propre ! Si vous avez l’œil vous saurez repérer les drailles (chemin de transhumance des brebis), les lavognes (bassins aménagés par l’homme dans la nature pour abreuver les troupeaux) ou même les allées de buis, paysage typique du Larzac façonné par les chevaliers.
Infos pratiques :
- Visite libre avec un livret de visite
- Ouvert du 2 janvier au 18 décembre (sauf fermeture exceptionnelle) de 10h à 16h et jusqu’à 18h de juin à septembre. Fermeture d’1h entre 12h30 et 13h30.
- Prix adulte : 6 € Prix enfant : 3 €
>> Plus d’informations sur la Tour du Viala-du-Pas-de-Jaux
Le fort de Saint-Jean-d’Alcas
Plus au sud à 14Km, au centre du petit village de Saint-Jean et Saint-Paul se cache un fort cistercien médiéval entouré d’imposantes murailles très bien conservées.
A l’intérieur : des maisons traditionnelles du XVème siècle, des petites ruelles pavées, un passage couvert, l’église et le logis de l’Abbesse …
Le Fort de Saint-Jean d’Alcas fut édifié au Moyen-Age à l’initiative de l’abbesse cistercienne de Nonenque, propriétaire du village. L’idée de cette enceinte était de protéger les villageois et les biens pendant la guerre de Cent Ans (1337-1453) qui sévissait particulièrement en Rouergue. L’abbaye de Nonemque était à cette époque un monastère cistercien pour femmes. Il fut construit en 1146 sur la commune de Marnhagues-et-Latour (à 15km).
La forme actuelle du fort date de 1439 d’après un plan rectangulaire avec des tours rondes dans les angles. L’église, plus ancienne et déjà fortifiée fût intégrée aux fortifications. Sa particularité réside dans le fait que c’est un fort villageois et non un fort occupé par un seigneur. C’est aussi la démonstration du rayonnement de l’ordre cistercien à l’échelle européenne.
Il est possible de monter en haut de la tour poivrière pour admirer la vue imprenable sur les contreforts du Larzac et les cirques de Tournemire/Saint-Paul des Fonts. Des visites guidées ou audioguidées sont disponibles pendant la période touristique.
>> Un important projet de restauration concerne le fort, la statue de la Vierge et la Croix, un appel aux dons est lancé pour maintenir en vie ce patrimoine historique.
La Couvertoirade
Et voici le site qui termine la boucle : La Couvertoirade, mon petit favori. A 35Km de Saint-Jean d’Alcas, c’est le plus proche de Montpellier (1h environ via l’A75).
La cité de La Couvertoirade est classée parmi les « Plus Beaux Villages de France ». Et pour cause, en plus d’avoir beaucoup de charme elle offre un véritable voyage dans le temps. En foulant ses ruelles vous pourrez découvrir le seul château templier de France qui tient encore debout, mais aussi le four banal, l’église, les hôtels particuliers, ses jolies places végétalisées … Des tavernes, échoppes et boutiques rythmeront votre promenade dans une ambiance paisible et conviviale. Les artisans et habitants vous parleront avec passion de leur village et leur mode de vie.
Lorsqu’au XIIIème siècle, l’ordre du Temple reçoit en donation une partie des terres du Larzac, ils viennent bâtir sur un éperon rocheux un château défensif au lieu-dit du Mas Aymar. Après l’abolition de l’Ordre, la commanderie de Sainte-Eulalie dont fait partie la Couvertoirade passe la même année aux mains des Hospitaliers. En 1328 le village compte entre 540 et 600 habitants.
A l’initiative des Hospitaliers toutes les commanderies du Larzac se dotent de murailles. Les remparts enserrant le village seront construites en 5 années seulement. Après la guerre, la Couvertoirade comme l’ensemble des villages Templiers/Hospitaliers va connaître une ère de prospérité et de belles maisons du XVe et XVIe siècle vont sortir de terre. Pendant les guerres de religion qui ont suivi, le commandeur de Sainte-Eulalie-de-Cernon installe dans le château, une petite garnison armée avec à sa tête un capitaine. Cette précaution ne sera pas de trop, en 1562 l’évêque de Lodève devra venir en personne avec une troupe pour débloquer la place assiégée par les Huguenots. La paix retrouvée le village se développe à l’extérieur des murailles.
Autour du village, il est possible de faire des petites balades sympas : notamment aller à la rencontre du moulin à vent du Rédounel ou aller voir la plus grande lavogne du Larzac près de l’enceinte du village (via la porte sud) …
Pour plus d’infos historiques sur La Couvertoirade, je vous conseille de visiter l’hôtel de La Scipione qui propose des panneaux explicatifs, un film et l’accès au chemin de ronde (Visite libre hôtel + remparts – 3 € – prix enfant 2 €)
Hébergement & saveurs locales
Les Trémières
Durant notre séjour nous avons posés nos valises dans le gîte « Les Trémières« situé à Saint-Paul-des-fonts. C’est une chambre d’hôtes et un gîte étape pour les marcheurs. Ceux qui le souhaitent peuvent poser leur tente dans le jardin et profiter des commodités et des repas. Sans chichi, ce joli hébergement offre un bel environnement, au cœur même du cirque de Saint-Paul-des-fonts. Très bien situé il permet de rejoindre rapidement les villages fortifiés aux alentours mais aussi pourquoi pas d’aller passer une soirée à Saint-Affrique. Nos hôtes nous ont très bien accueillis et même proposés la veille de partager avec eux un repas pour un prix très abordable. La chambre était propre, moderne et confortable. 3 chambres sont disponibles avec salle-de-bain, 2 avec les toilettes sur le pallier et 1 avec les toilettes intégrés.
A l’extérieur un espace partagé couvert permet de prendre un café ou plus entre amis, il y a également un beau jardin. Le lendemain matin le petit déjeuner se prend dans la maison principale qui sert uniquement aux clients, les propriétaires habitant une maison un peu plus loin. La salle à manger offre une grande tablée sur laquelle nous attendait un chocolat chaud/café, du pain, du beurre, de la confiture maison, du fromage, du miel local … Des bons produits pour bien commencer la journée !
Restaurant Le Chat qui dort
Le samedi soir nous avons poliment décliné la table d’hôtes afin d’aller à Saint-Affrique. Nous avions très envie de manger de l’aligot, le plat phare de l’Aveyron, et c’est ainsi que nous avons choisi ce restaurant. Sur une petite place un peu à l’écart, il propose quelques plats typiques de la région.
Nous avons opté pour un menu à une vingtaine d’euros :
- En entrée : des tartines de pain perdu avec du roquefort et une salade savoureuse entourée d’une feuille de brique
- En plat : Aligot saucisse bien entendu ! (très bon)
- En dessert : un assortiment dont une spécialité typique du Larzac : le flaune, une sorte de flan à base d’eau de fleur d’oranger et de recuite de brebis (fromage typique de l’Aveyron). C’est tout doux et léger, je conseille !
Les bonnes adresses | Les spécialités à rapporter |
Le gîte Les Trémières à Saint-Paul-des-Fonts
Le restaurant Le Chat qui dort à Saint-Affrique Restaurant La Pourtanelle à Saint-Jean d’Alcas |
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J’espère que cette plongée sur les terres mythiques du Larzac vous aura transporté autant que moi ! N’hésitez pas à laisser un commentaire si vous souhaitez plus d’informations ou de conseils sur cette destination.
A suivre prochainement : un article sur le vélorail et un autre sur une super balade dans la forêt domaniale du Larzac à la recherche des Canalettes (Mais qu’est-ce donc ? affaire à suivre … :))
Inspiration Occitane
Thanks!